Programme
éditions du Mac/Val, 60 pages, 2010.
« Entre le jeu dont vous êtes le héros et une critique acerbe de cette société capitalistico-post-moderne, l’écriture et le récit d’Éric Arlix créent l’angoisse et rencontrent les préoccupations de l’artiste Simon Starling. L’artiste ne cesse de raconter la brutalité du réel et, par une forme de récit plastique, dénonce cette brutalité mais offre dans le même temps une échappatoire poétique. Éric Arlix fait fonctionner identiquement son récit. Entièrement à la deuxième personne du singulier, la prose vive et rapide nous mène en enfer, dans un univers aveugle où l’individu perd toute notion identitaire, où certains détails révèlent un peu de drôlerie tout en nous gardant dans une grande inquiétude. Le programme n’est pas modifiable ; mais la pensée du lecteur est à l’oeuvre devant l’idéologie qui forge ce texte. Lecteur, tu auras peur après lecture. Parce que tu entendras dans quel monde tu vis. »
Collection Fiction du musée d’art contemporain de Vitry sur Seine (Mac Val) consistant à commander à un écrivain un texte de fiction sur le travail d’un artiste exposé au Mac Val, en l’occurrence l’artiste Simon Starling.
Adapté au théâtre en 2017 par le Groupe Merci >>>
Adapté en installation en 2011 par Nicolas Lespagnol-Rizzi >>>
Extrait
C’est là.
Gare ton 4×4 devant le perron
à côté de la Fiat 500.
Une fois franchi le pas de la porte
tu déposeras ton petit sac toilé à l’endroit
qui lui est réservé.
Ne t’attends pas à entendre retentir
une sonnerie, ici il n’y a pas d’horaires.
Ta capacité à désirer apprendre en sera décuplée.
Tu t’attaqueras à un escalier massif imposant le poids de la tradition.
Chaque marche confirmera ton ascension par un effet sonore.
Ta main glissera sur la rambarde.
Arrivé, tu opéreras sans doute une rotation de 90 degrés antihoraires pour admirer le hall.
Tu accrocheras ton petit blouson et rangeras tes espadrilles dans le casier.
Tu te dirigeras vers la porte semi-ouverte qui te fait face.
Le sol en marbre te semblera terriblement froid,
imagine juste que tu remontes un torrent.
Un long couloir surchargé d’objets vitrinés t’intriguera lors de son franchissement.
Tu en détailleras certains,
tu seras sans doute intrigué par d’autres.
Sache que tu peux rester dans cette salle autant de temps que tu le souhaites, il n’y a pas,
ici, d’horaires, rappelle-t-en, et ta capacité à désirer apprendre en sera décuplée.
Quand tu décideras de sortir de ce couloir tu emprunteras un escalier en pierre reconstituée.
Quelques meurtrières fourniront le minimum de lumière nécessaire.
Arrivé tu profiteras d’une balustrade pour t’y appuyer, admirer le paysage,
reprendre ton souffle, t’interroger assez longuement.
Surtout, profite.